Devenir adulte : voilà un sujet complexe, déjà traité par la littérature, le cinéma, la sociologie, l’histoire, la psychologie… Encore aujourd’hui, nous n’avons toujours pas trouvé une définition figée de ce que « grandir » veut dire. Chaque culture a sa façon de comprendre les mécanismes au travers desquels nous nous développons, mais parfois il suffit d’apprendre à mieux se connaître, à mieux s’écouter et à mieux communiquer avec les autres. Lorsque l’auteur Thomas D’Ansembourg pose la question « Notre façon d’être adulte fait-elle sens et envie pour les jeunes ? », le psychothérapeute ouvre une grille d’analyse de nos pratiques et de nos habitudes. Voici quelques conseils de cet ouvrage écrit par le grand expert de la Communication Non-Violente (CNV) en Europe et l’un des principaux speakers du programme EVE depuis ses débuts.
Thomas D’Ansembourg débute son ouvrage avec un constat : de nombreux chercheurs s’accordent sur le fait que les enfants de la nouvelle génération se confrontent à des « systèmes de pensée » qui ne leur correspondent pas, faute de fluidité, de sens et de liberté créative. À partir de là — et sans vouloir tomber dans le piège de la culpabilisation ou du jugement — l’auteur propose un exercice de réflexion et d’apprentissage. Il s’agit de se remettre en question pour devenir de meilleurs rôles modèles pour les plus jeunes, voire d’apprendre avec eux (grâce à l’altérité produite par la différence d’âge) de nouvelles façons de voir le monde et d’interagir avec les autres.
Premier pas : déprogrammer les « mécanismes autobloquants » de nos relations et de notre évolution. Oublions la phrase « On n’est pas ici pour rigoler » ! Car oui, même si nos activités quotidiennes peuvent nous demander un engagement et des responsabilités, nous pouvons néanmoins retrouver des joies partagées et de la motivation. Il faudrait cependant sortir de la logique qui veut que la vie ne soit qu’un recueil de confrontations et de défis. Cette façon de voir les choses produit en outre le sentiment que nous ne possédons pas le « droit » d’être heureux : pas besoin de le répéter, vous l’avez compris, nous avons toute légitimité à revendiquer le bonheur ! De la même façon que nous pouvons sortir des rapports de force quotidiens — en passant notamment par la CNV — et éviter de cultiver une attitude de méfiance envers les autres en faisant preuve « d’expansion et d’ouverture ».
Évidemment, ce n’est pas toujours facile de changer ses habitudes et d’adopter une autre hygiène de vie. Pour répondre à cette difficulté, Ansembourg nous propose de mettre en place un « climat inspirant dans la relation » composé de trois ingrédients : ce qu’il appelle « l’amour vivant », c’est-à-dire une pratique d’amour « profond pour les êtres vivants, humains, plantes et animaux » ; le respect ressenti (qui n’est pas prétendu ni prescrit, mais vécu et vérifié dans les attitudes) ; finalement, le dernier élément de cet environnement bienveillant est le sens bien compris : échappons aux injonctions et aux « Il faut le faire ! » et soyons plus en accord avec nos valeurs, nos vraies envies et nos rêves.
Dans un livre qui propose de renouer les relations entre générations, Thomas D’Ansembourg ne saurait oublier un débat central : est-il possible de sanctionner sans punir ? Pas besoin de suspense : la réponse est oui ! Il faudrait avant cela déconstruire la culture « du malheur » et la notion de « peine », cette souffrance censée aider à corriger une mauvaise attitude. Car la justice restaurative serait un outil beaucoup plus efficace, selon l’auteur, pour bâtir un système capable de recadrer, de redonner de la confiance et de maintenir les liens tout en éduquant.
Marcos Fernandes pour le webmagazine EVE