72 % des jeunes actifs placent l'intelligence émotionnelle en tête des compétences managériales, d’après une étude de LégiSocial et TodoSkills. Ce chiffre illustre un changement de paradigme majeur, accéléré par la crise sanitaire et porté par les attentes de la Génération Z qui redéfinissent le contrat de travail. Le management s'ancre de plus en plus dans la capacité à gérer les relations humaines. Comment les entreprises peuvent-elles répondre à cette attente, et quels en sont les bénéfices concrets et les risques potentiels ?
De la confiance à la performance
L'intelligence émotionnelle, popularisée par Daniel Goleman, est la capacité à reconnaître, comprendre et maîtriser ses propres émotions, tout en percevant celles des autres pour interagir efficacement. On assiste ainsi à un glissement du manager « chef d'orchestre », dont l'autorité verticale suffisait à guider, vers un manager « coach » à la posture plus horizontale. Cette évolution répond à un nouveau rapport au travail : les jeunes générations, constatant l'épuisement de leurs aînés, ne cherchent plus un simple emploi, mais une cohérence entre épanouissement personnel et intégrité professionnelle.
Loin d'être un concept abstrait, l'impact de l’intelligence émotionnelle sur la performance est quantifiable. En effet, selon Capgemini Research Institute, 83 % des organisations estiment que l'intelligence émotionnelle jouera un rôle crucial dans leur réussite future, et celles qui investissent dans ces compétences voient leur performance s'améliorer de plus de 20 %. Les équipes dirigées par des leaders faisant preuve de discernement émotionnel, avec lucidité et empathie, voient donc leur productivité augmenter. Leurs collaborateurs sont aussi moins susceptibles de quitter l'entreprise. En favorisant un climat de confiance et de sécurité psychologique, l'intelligence émotionnelle devient donc un levier direct de performance.
Quelles actions pour les entreprises ?
Pour attirer et retenir les talents de la nouvelle génération, il est crucial d'intégrer l'intelligence émotionnelle dans des pratiques managériales qui répondent à leur quête de sens et de relations de travail saines. Mais alors comment la mettre en place concrètement au sein des organisations ?
Plutôt que des formations génériques, il s'agit tout d’abord d’outiller les managers pour gérer les situations qui comptent le plus pour les jeunes : donner un feedback constructif et régulier (plutôt que l'entretien annuel), savoir mener une discussion sur le bien-être sans tabou, ou encore animer une équipe en maintenant la cohésion.
Il est également crucial de repenser le recrutement et la promotion. L'intelligence émotionnelle doit devenir un critère de sélection aussi important que les compétences techniques pour accéder à un poste de manager. Profiter des entretiens pour évaluer l’empathie, la gestion du stress ou la capacité à communiquer est un premier levier.
Enfin et parce que les jeunes actifs attendent de la transparence et de l'écoute, il faut instaurer une culture du dialogue. Cela peut passer par des formats comme le "reverse mentoring", où un jeune collaborateur partage sa vision du management avec un dirigeant. C'est un moyen puissant de faire remonter les attentes concrètes et de déconstruire les schémas de leadership traditionnels.
Un outil à double tranchant ?
Si l'intelligence émotionnelle est une compétence-clé, sa mise en œuvre ne doit pas reposer uniquement sur les épaules des managers. Le principal risque serait de les laisser seuls face à cette nouvelle charge : une empathie trop présente, sans soutien ni cadre, peut mener à une surcharge émotionnelle et à l'épuisement. Et le manager ne doit en aucun cas se transformer en thérapeute.
Cet enjeu individuel souligne en réalité une responsabilité collective. Pour que ce management plus humain soit durable, il doit s'inscrire dans une approche globale portée par toute l'entreprise. C'est la culture du travail qui doit évoluer pour accompagner et soutenir cette posture, en instaurant un climat où le bien-être est l'affaire de tous.