Syndrome de la Schtroumpfette, Effet Matilda, votre nouvelle rubrique « Un concept à la loupe » cerne les éléments de langage pour creuser des notions essentielles à la réflexion du leadership au féminin.
Vous serez peut-être surpris-e d’y trouver ce mois-ci, non pas une abstraction empruntée à l’univers des sciences sociales, mais le titre de l’événement mondial qui se tiendra demain, et pour la 37è année consécutive. S’il nous a semblé utile de traiter le 8 mars comme un concept, c’est parce qu’il apparait que, souvent abrégée et passablement déformée en « Journée de la femme », cette dénomination de « Journée des Droits des Femmes » mérite d’être explorée… Pour être restaurée!
Des femmes plurielles
Quand on dit la « Journée de la femme », ça a le mérite d’être court, direct, percutant. Mais le défaut d’être réducteur, galvaudant et un peu grossier. Pas au sens de vulgaire, au sens d’insuffisamment fin et précis. Car LA femme, on a bien cherché, mais on ne l’a pas trouvée. On a rencontré DES femmes, oui, par centaines, par milliers, par millions et milliards (elles ne sont jamais que 3,5 milliard environ). Elles ont toutes une histoire unique, toutes une personnalité authentique, toutes un parcours à elles. Certes, elles peuvent partager des choses, mais comme elles en partagent aussi avec des hommes. Bref, elles sont toutes différentes et le premier de leurs droits, comme celui de n’importe quel être humain, c’est d’être considérées chacune avec ses singularités.
Autrement dit, le 8 mars n’est pas la journée de la féminité avec un grand F fleuri en pleins et déliés. Voilà un rappel nécessaire pour éviter de se fourvoyer dans des initiatives d’un goût parfois douteux qui voudraient nous faire patauger dans des stéréotypes sexistes d’un autre âge.
Des droits qu’il faut rendre effectifs
Le 8 mars, c’est une Journée Internationale, décidée par l’ONU, pour porter la question des droits des femmes sur le devant de la scène.
Mais que sont ces droits-là? Ce sont des droits que l’on peut qualifier pour certains de « féminins » certes, quand ils ont trait par exemple aux questions de santé gynécologique ou obsétricale, mais dans l’ensemble, il s’agit essentiellement de simples droits humains : être traitée à égalité pourrait ainsi tous les résumer.
Oui, mais alors, si ce sont des droits que les hommes ont aussi, quel est le sens d’une telle journée? De souligner que partout dans le monde, et cela en dépit de législations parfois très abouties et dans des contextes économiques et politiques plutôt matures, ces droits ne sont pas effectifs pour les femmes. Jugez-en plutôt : en France, malgré un principe d’égalité salariale inscrit dans la loi depuis 1983, les femmes gagnent en moyenne 27% de moins que les hommes* ; dans le monde, elles assurent 66% du working time mais ne détiennent qu’1% de la propriété** ; et c’est encore sans évoquer le serpent de mer des tâches ménagères (qui leur incombe chez nous à 65%***) et celui de leur sous-représentation aux postes de direction des entreprises comme aux responsabilités politiques…
Une Journée pour en parler, toute l’année pour agir
De droits à rendre effectifs pour des femmes au pluriel, voilà de quoi parle la Journée Internationale des Droits des Femmes. Mais ça ne signifie pas non plus, comme d’aucun-es le disent parfois que c’est une fois par an qu’on s’en occupe et puis basta. Cette Journée-là est faite pour établir l’état des lieux, noter les progrès, partager les bonnes pratiques et se donner des objectifs… Pour pouvoir agir aussi tout le reste de l’année!
Marie Donzel, pour le blog EVE
N’oubliez pas de participer à notre sondage : Pour vous que représente le 8 mars?
* Observatoire des Inégalités 2013
** UNICEF, 2007
*** INSEE, 2011
Les droits des femmes en dix dates
1718 – La Suède accorde le droit de vote aux femmes… Jusqu’en 1771, puis à nouveau à partir de 1862. Les Finlandaises attendront 1906, les Anglaises 1928, les Philippines et les Birmanes 1935, les Françaises 1944, les Mexicaines 1953 et les Saoudiennes 2011.
1791 – Olympe de Gouges présente la Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne à l’Assemblée française… La Convention, sans surprise, rejette son texte, mais il constitue malgré cela l’acte de naissance d’une conscience politique au féminin affirmée en tant que telle.
1880 – Les lycées publics français s’ouvrent aux filles. Le Républicain Camille Sée croise le fer avec des opposants qui s’inquiètent d’une déstabilisation des fondations de la société quand les femmes deviendraient des « libres penseurs ».
1900 – Pour la première fois, les femmes participent aux Jeux Olympiques.
1943 – Les femmes sont autorisées à entrer dans le bâtiment de la Bourse de Wall Street.
1965 – les Françaises peuvent travailler et disposer de leur propre chéquier sans autorisation de leur mari
1971 – Première mondiale : un employeur est condamné pour discrimination à l’embauche par la Cour Suprême des Etats-Unis. La France se dotera douze ans plus tard d’une loi pour l’égalité professionnelle qui interdit les discriminations fondées sur le genre.
1974 – Françoise Giroud entre au gouvernement français… En tant que secrétaire d’Etat à la « condition féminine »!
1998 – la France adopte le principe de la parité aux fonctions électives.
2014 – un premier cabinet d’avocates ouvre en Arabie saoudite.