Chaque année, depuis une petite décennie, à l’approche de Noël, le débat revient sur le tapis. Pourquoi des boîtes roses pour les petites filles et des boîtes bleues pour les petits garçons ? Pourquoi des jeux de construction valorisés par la mise en scène de petits gars et des poupées dans les bras des fillettes ? Pourquoi de célèbres jeux et jouets qui, dans les années 1970 s’adressaient à tous les enfants sont devenus des mondes séparés en fonction de la couleur d’un emballage, de la promesse d’un univers et d’une expérience genrés ?
Les expert·e·s des stéréotypes et des mécanismes psycho-cognitifs qui les transforment en biais décisionnels influençant l’orientation, la projection de soi, la vision du monde des individus insistent depuis longtemps sur l’importance de proposer aux enfants des représentations les plus ouvertes possibles pour que leurs expériences de l’existence et de la sociabilité les amènent davantage à développer de la curiosité qu’à ancrer des préjugés. Aussi, il est loin d’être futile de s’intéresser aux jouets qu’on leur propose.
Le Conseil de la mixité et de l’égalité professionnelle dans l’industrie, initié par la Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de l’économie Agnès Pannier-Runacher et dans lequel siègent des représentant·e·s de plusieurs grandes entreprises (dont notre partenaire L’Oréal) a planché sur le sujet… Pour livrer, en cette fin septembre 2019, une Charte d’engagements volontaires à destination des fabricants et distributeurs de jeux et jouets.
Cette Charte couvre l’ensemble de la chaîne de valeur du secteur : depuis la conception des jouets qui doit se faire en conscience des biais de façon à les désactiver, jusqu’à la publicité qui doit œuvrer à casser les stéréotypes davantage qu’à les entretenir, en passant par le conditionnement qui gagnerait à une certaine neutralisation des codes de genre ; la conception et le design des catalogues qui ont intérêt à valoriser les bénéfices du jeu (créativité, sociabilité, développement physique, développement de l’esprit logique…) plus qu’à l’assigner à un sexe ; la signalétique en magasin qui peut tout à fait rassembler le rayon enfant dans un seul univers et non créer des frontières entre filles et garçons ; la formation du personnel de vente dont les précieux conseils aux parents seront d’autant plus pertinents qu’ils s’adresseront au tempérament et aux besoins de l’enfant plus qu’aux croyances sur les différences de genre… La charte invite l’ensemble de ses acteurs à travailler étroitement avec les associations, notamment pour encourager, via le jeu, les vocations scientifiques des filles et l’intérêt des garçons pour le « care ».
Afin de mettre en lumière les fabricants et distributeurs qui témoigneront de bonnes pratiques susceptibles d’influencer tout le secteur, la charte suggère la création de Prix et autres systèmes de récompenses médiatisables.
Marie Donzel, avec la complicité d’Aurélie Gasnier (L’Oréal) pour le webmagazine EVE.