Politique, économie, culture, sport, dans tous les domaines, la question du leadership féminin s’est posée avec acuité au cours du mois écoulé. Le blog EVE récapitule les événements qui ont fait vibrer la toile en juin.
Le verre à moitié vide/à moitié plein du mois : 26,86% de femmes à l’Assemblée
Après la constitution du premier gouvernement paritaire que nous évoquions dans notre dernière revue de web, tous les espoirs étaient permis. On espérait que la France, tradionnellement mauvaise élève de la parité au Parlement, ratrapperait son retard.
Bilan : peut mieux faire!
Certes, on est passé de 19% à 26,86 % de femmes à l’Assemblée nationale. La presse a donc rapidement parlé de record. A juste titre dans la mesure où les femmes n’ont jamais été aussi nombreuses à siéger au Palais Bourbon, même si à nos yeux, tout record n’est pas une performance. En l’occurrence, le verre à moitié plein est… aussi un verre à moitié vide!
Mariette Sineau, directrice de recherche au CNRS et auteure de Femmes et pouvoir sous la Vè République explique ce décevant état de fait en mettant en cause notamment le principe de « la prime au sortant » et les sanctions trop peu dissuasives qui s’appliquent aux partis ne respectant pas la règle de la parité.
Plusieurs médias ont en effet relevé que les partis préfèraient « passer à la caisse » que de donner autant d’investitures aux femmes qu’aux hommes.
A l’arrivée, malgré le reccord annoncé, la France reste mal classée au palmarès des pays les plus avancés sur la parité, toujours derrière l’Afghanistan, notamment.
Le débat du mois : les « femmes de… » ont-elles vraiment le droit de faire leur travail?
Tandis que la Suisse met en place un dispositif permettant aux femmes de patrons de PME de valider leurs acquis professionnels en tant qu’actrices à part entière aussi bien de la prise de risque que du succès de l’entreprise, le débat en France porte sur le statut des « femmes de politique ».
Un tweet archi-commenté (et que nous ne commenterons justement pas) a ouvert le débat sur celles, souvent journalistes, qui voient leur carrière interrompue, voire sacrifiée, quand leur compagnon accède au plus haut niveau du pouvoir politique.
La journaliste Audrey Pulvar s’avoue excédée par ce statut de « femme de… » qu’on lui colle sans qu’elle y tienne.
Pour Jean-Pierre Elkabbach, le « sacrifice des femmes journalistes en couple avec des hommes politiques » est le fruit d’une « morale d’hommes » davantage qu’un enjeu de séparation des pouvoirs.
Le spécialiste des médias, Philippe Kieffer parle lui « d’obscurantisme au nom de la transparence » et met en cause avec justesse les débordements de la notion de « conflits d’intérêt ».
Les artistes du mois : la polémique cannoise fait des émules!
Dans notre dernière revue de web, nous évoquions la place des femmes dans l’industrie du cinéma.
Il faut croire que les signataires de la tribune « à Cannes les femmes montrent leurs bobines, les hommes, leurs films » ont fait des émules dans le monde du spectacle vivant.
Alors qu’une étude de 2011, passée quasiment inaperçue, révélait que « 96% des opéras et 95% des concerts , 85% des centres dramatiques nationaux, 75% des théâtres nationaux et 70% des centres chorégraphiques nationaux étaient dirigés par des hommes et 81,5% des postes dirigeants de l’administration culturelle occupés par les hommes », les femmes de théâtre, de musique et de danse sont revenues sur le devant de la scène pour dénoncer le retard du milieu culturel sur les problématiques d’égalité.
Tant qu’on est dans à la page culture, évoquons la remise du Prix des femmes de lettres Simone Veil à Françoise Héritier pour son bouleversant ouvrage Le sel de la vie…
… Tout en posant une question qui fâche : les prix littéraires « de femmes » seraient-ils sexistes?
Les forums du mois : les femmes, la force montante!
– Le Global Summit of Women d’Athènes s’est tenu du 31 mai au 2 juin. Un millier de femmes venues de 70 nations ont dialogué trois jours durant sur le rôle des femmes dans la croissance économique.
On vous en reparle très bientôt avec une interview exclusive de Muriel Pénicaud, DG RH du groupe Danone qui a participé, en tant que speaker, à ce forum.
– Le Sommet Rio + 20 : la conférence des Nations Unies sur le développement durable a mis en évidence le rôle indispensable des femmes, partout dans le monde, sur les questions environnementales.
Du discours de Michelle Bachelet au Forum des Femmes Leaders d’ONU Femmes à Rio + 20, on retiendra notamment que « La lutte en faveur de l’égalité des sexes est une caractéristiques déterminante des nouvelles générations. Nous devons aujourd’hui nous assurer qu’elle forme la base du changement structurel, culturel et institutionnel essentiel au développement durable. »
– Le Women’s Forum for the Economy and Society s’est réuni à Sao Paulo les 4 et 5 juin.
Pourquoi le Brésil? Parce que, dit Véronique Morali, ce « pays qui aime ses femmes« , est à la pointe de la réflexion sur l’égalité, est une vraie « source d’inspiration » pour le Women’s forum… Et pour l’humanité tout entière!
– Le Dialogue for action Africa a eu lieu à Libreville le 11 juin.
Dans son discours d’ouverture, la femme d’affaires gabonaise Sylvia Bongo, a mis l’accent sur l’entrepreunariat féminin et l’éducation des filles, citant le poète Ahmed Chouaki : « Qui éduque une fille, éduque une nation ».
Le terrain de réflexion (et d’action) des prochains mois : le sport
Alors que le tour de France des cyclistes hommes s’élance sous le feu des projecteurs (celui des femmes ne partira lui que dans quelques semaines, sans caméra-motos pour le suivre à la trace), les propos du tennisman Gilles Simon laissent encore un goût amer aux vedettes (féminines) de la raquette : fraîchement nommé au conseil des joueurs de l’ATP, le champion a affirmé publiquement son opposition à la politique d’égalité salariale entre hommes et femmes dans les tournois du Grand Chelem, au prétexte que… Le sport masculin serait plus attractif pour le public que le sport féminin!
Les femmes du tennis ont apprécié l’argument à sa juste valeur : Marion Bartoli lui a notamment renvoyé la balle avec panache!
Au-delà de la polémique, notons qu’à l’approche des JO de Londres (auxquels l’Arabie saoudite a finalement concédé a laissé participé une athlète, la cavalière Dalma Malhas), de nombreuses voix s’élèvent aujourd’hui pour dénoncer les inégalités hommes/femmes dans le monde du sport.
Une enquête récente de la journaliste Fabienne Broucaret met en évidence le retard sur ce terrain : féminisation des disciplines, enjeux économiques, rôle des médias, les pistes de réflexion (et d’action) ne manquent pourtant pas.
La marque Nike ne s’y est d’ailleurs pas trompée en axant sa campagne de communication des Jo sur les femmes.
Et Audrey Keysers et Maguy Nestoret Ontanon, auteures de Football féminin, de développer une thèse passionnante sur les femmes qui seraient peut-être bien « l’avenir du football ».
L’hommage du mois : Elinor Ostrom
En 2009, elle fut la première (et aujourd’hui toujours la seule) femme à recevoir le Prix Nobel d’économie. L’américaine Elinor Ostrom dont les travaux portaient principalement sur la gestion des biens communs par les collectifs d’usagers, est décédée le 12 juin dernier. Nous souhaitons lui rendre ici un vibrant hommage.
La revue de web du programme EVE revient à la fin du mois d’août, pour récapituler tout ce qui se sera dit sur la toile pendant l’été. En attendant, n’hésitez pas à nous signaler, en commentaires, ou sur twitter, toute actualité sur l’égalité, la mixité, la parité et le leadership féminin que vous souhaiteriez voir mise en avant sur le blog du Programme Eve.
Marie Donzel