Leadership au féminin : ce qu’on retiendra de l’été 2013

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Après la trêve estivale durant laquelle vous avez pu redécouvrir toutes nos interviews d’expert-es, les initiatives de nos partenaires, les portraits les plus inspirants de leaders au féminin et les coups de coeur livres, spectacles, expos du blog, vous avez de nouveau rendez-vous en cette rentrée avec toutes vos rubriques préférées du blog EVE… Dont la fameuse revue de web.

Que s’est-il passé durant l’été sur le front du leadership au féminin ? On fait tout de suite la rétrospective de l’actu des deux mois écoulés.

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L’étude « sport & leadership » de l’été 

Nous en avions bien l’intuition en ouvrant il y a un an un grand chantier de réflexion sur le sport et le leadership au féminin : la pratique du sport de compétition dans l’enfance et la jeunesse des femmes favorise leur accès aux plus hautes responsabilités à l’âge adulte.

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C’est ce que confirme l’étude Ernst & Young « From elite female athletes to exceptional leader » parue à la mi-août. De Dilma Rousseff, ancienne championne de volley, à Condoleeza Rice, tenniswoman et patineuse de talent, en passant par Christine Lagarde ex-star de la natation synchronisée, Hillary Clinton qui a tâté du ballon rond ou Indra Nooyi as du baseball, le parcours de 20 femmes d’exception a été analysé par les consultant-es du grand cabinet d’audit américain. Il en ressort que la pratique du sport leur a vraisemblablement permis d’acquérir certaines valeurs du leadership que l’éducation familiale et scolaire tend traditionnellement à négliger chez les filles.

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Faisons donc faire du sport à nos filles! Même si le match est loin d’être gagné sur ce terrain.

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En effet, tandis que nos basketteuses, les « Braqueuses », associées à de nombreuses championnes de diverses disciplines, lançaient fin juin un appel pour « que cesse le mépris du sport féminin », des cyclistes féminines du monde entier ont fait tourner cet été une pétition pour le retour de leur Tour de France, une compétition qui a été tant sous-médiatisée et boudée par les sponsors, qu’elle a littéralement fini par disparaître, depuis déjà plusieurs années et dans l’indifférence quasi-générale.

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Les débats « parentalité » de l’été

Début juillet, Najat Vallaud-Belkacem a présenté son projet de loi-cadre pour l’égalité femmes/hommes : tout un corpus de mesures pour rendre plus effectifs les droits relatifs à l’égalité femmes/hommes. Toutefois, c’est un volet particulier de ce projet de loi qui a concentré toutes les discussions : la réforme du congé parental.

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Alors qu’au Japon, les mères s’organisent pour lutter contre le « mata hara » (materny harassment) qui vise à les décourager de travailler et que l’Allemagne opte pour une allocation « prime aux fourneaux » offerte aux mères d’enfants de moins de trois ans qui renoncent à leur emploi, la réforme de Najat Vallaud-Belkacem est au contraire destinée à faciliter la poursuite des carrières des mères autant qu’à encourager les pères à mieux partager les responsabilités parentales en les incitant à prendre leur part des congés parentaux. 

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Les propos maladroits d’une leader politique affirmant que les pères n’ont « pas envie de changer des couches » et les réponses toniques de plusieurs pères que la Pampers n’effraie pas, ont cependant un peu occulté d’autres mesures intéressantes du projet de loi-cadre : accès aux marchés publics réservés aux prestataires vertueux en matière d’égalité professionnelle, déblocage du compte épargne temps des salarié-es pour le financement des services à la personne, déploiement de la parité dans les chambres consulaires, renforcement des attributions et des pouvoirs du CSA pour lutter plus efficacement contre les stéréotypes sexistes dans les médias…

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Les bonnes intentions de l’été : des femmes mieux traitées à la télé

Les médias, parlons-en… Début juillet, lors du colloque « En avant toutes », le Président de France Télévisions, Rémy Pflimlin, a annoncé son intention de faire une meilleure place aux femmes dans l’organigramme du groupe audiovisuel public : elles devraient compter pour 1/3 (contre 1/4 aujourd’hui) dans l’encadrement d’ici à fin 2015.

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Pflimlin a également pris des engagements en faveur d’une meilleure représentation des femmes à l’écran : plus d’expertes dans les émissions de débat et d’analyses de l’actualité (comme en écho à la récente étude britannique qui met en évidence les prismes d’une information politique conçue davantage à l’attention de l’auditorat masculin que féminin), plus de compétitions sportives féminines aux heures de grande écoute et une plus grande vigilance à l’égard des stéréotypes sexistes, en particulier dans les programmes pour la jeunesse (au moment même où l’actrice Geena Davis se lance avec ONU-Femmes dans la première grande enquête mondiale sur le sexisme dans les films pour enfants A lire aussi sur ce thème, l’excellente contribution de Sarah Alzieu sur l’impact des images télévisuelles sur la construction identitaire des enfants).

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Le billet enflammé de l’été : quand la figure de Jane Austen déclenche un lynchage sexiste sur le web

Tollé sur les réseaux sociaux en juillet!

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Pour avoir milité pour que le prochain billet de 10 £ soit à l’effigie de l’immense romancière Jane Austen plutôt qu’à celle de Mark Twain, la journaliste Caroline Criado-Perez a subi de violentes attaques sexistes sur Twitter
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L’actrice Anna Gunn, héroïne de la série Breaking Bad, vient à son tour de tirer la sonnette d’alarme sur le même thème : dans une tribune au New York Times, elle s’inquiète de la pratique décomplexée du lynchage sexiste à l’ère 2.0. et de ses effets désincitatifs pour les femmes qui auraient l’ambition de tenir un rôle de premier plan dans quelque domaine que ce soit.

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Le festival des polémiques « culture » de l’été

En matière d’égalité professionnelle, certains secteurs trainent la patte. Il en est ainsi de la sphère culturelle, plutôt rétive à faire une vraie place aux femmes aux plus échelons.

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Un an après les conclusions de l’étude commandée par la SACD sur la place des femmes dans les institutions publiques du spectacle vivant qui révélait des déséquilibres édifiants (15% seulement de femmes à la tête des centres dramatiques nationaux), la ministre de la culture Aurélie Filippetti a pris une décision en apparence simple mais qui a fait grand bruit dans le Landernau culturel : ne pas renouveler systématiquement les mandats arrivés à échéances des dirigeant-es en poste, en vue de favoriser notamment le renouvellement des générations et l’accès des femmes aux responsabilités dans le monde du spectacle subventionné.

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Décision qualifiée avec mépris de « lubie » par le patron des 13 Vents à Montpellier qui ne cache pas sa nostalgie du temps de Frédéric Mitterrand, lequel a par ailleurs attaqué la Ministre sur son « approche dogmatique » des nominations suite au remplacement du directeur du musée Guimet par une femme, Sophie Makariou.

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C’est finalement la Ministre des Droits des Femmes, Najat Vallaud-Belkacem qui a arbitré le débat en faisant paraître dans Libération une tribune intitulée « Qui a peur des femmes dans la culture?«  : « Rien ne justifie que l’égalité professionnelle s’arrête au seuil des théâtres ou des salles de musique, rien ne justifie qu’une petite fille ait moins de chance qu’un petit garçon de devenir une artiste, de s’exprimer et de partager son travail avec le public. C’est la raison, la seule raison mais la raison impérieuse pour laquelle le champ culturel est prioritaire dans la réforme des politiques publiques en faveur de l’égalité.« . Voilà, c’est dit.

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La discriminée de l’été : trop belle pour être professionnelle? 

Ca ressemble à un canular… Ou à la rigueur à une blague potache. Florencia Altara, ingénieure dans une petite société de développement californienne s’est littéralement fait virer du réseau LinkdIn pour… Photo trop sexy !

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Coupons d’emblée court aux fantasmes : Florencia Altara ne pose pas en bikini et n’a pas tout à fait l’allure d’une pin up sur le réseau pro. Mais selon les responsables du site, elle « regarde l’appareil photo comme si elle voulait lui faire l’amour ». Un regard trop sexy pour être crédible, en somme! Et apparemment pas digne d’une ingénieure, une vraie.

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La société qui emploie Florencia Altara a contre-attaqué en publiant une tribune de défense des femmes ingénieures… Et la blogosphère mondiale n’a pas manqué de souligner le préjugé qui consiste à imaginer la femme scientifique en binoclarde boutonneuse plutôt qu’en jolie brune pulpeuse au regard franc.

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L’action de la rentrée : panthéonisez-les !

Sur le fronton du Panthéon, il est écrit « aux grands Hommes, la patrie reconnaissante ». Et aux grandes Femmes, alors? Elles ne sont à l’heure actuelle que deux à y reposer (sur 73 « panthéonisé-es ») : la scientifique Marie Curie et Sophie Berthelot (en tant qu’épouse pour cette seconde).

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Partant du principe que léser les grandes figures féminines de l’histoire dans les ordres symboliques, c’est ne pas accorder aux femmes d’aujourd’hui la reconnaissance qu’elles méritent et les priver des rôles modèles qui leur sont essentiels pour assumer leur ambition, plusieurs associations ont décidé, en cette rentrée, de mener une importante campagne en faveur de la panthéonisation de cinq femmes qui ont joué un rôle majeur pour la nation : Olympe de Gouges, Louise Michel, Germaine Tillion, Simone de Beauvoir et Guadeloupe Solitude.

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Pour Clémence Helftert, porte-parole du groupe d’associations organisatrices de la pétition et de la manifestation, cette action a vocation à « remédier à l’invisibilisation des femmes dans la société. » D’aucun-es jugeront que c’est anecdotique et symbolique, il leur est répondu que si ça l’est, il n’y a précisément pas de raison fondamentale de s’y opposer…

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Marie Donzel