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En chiffre : 7 femmes sur 10 sont en surcharge mentale personnelle et professionnelle
Devoir constamment penser à tout, tout le temps et pour tout le monde
Les femmes n’ont pas besoin qu’on leur fasse un dessin : elles sont 97% à savoir de quoi on parle quand il est question de charge mentale. Pour 52%, c’est le fait de « devoir constamment penser à tout, tout le temps et pour tout le monde ». Pour les 14% les plus accablées par cette charge, cela se traduit par « l’impression d’être dépassée, de ne pas s’en sortir au quotidien ».
La ménagère & la manager
La charge mentale est associée aux responsabilités corrélées aux tâches domestiques et familiales : tâches ménagères, gestion des enfants et/ou des parents en perte d’autonomie, pilotage du budget… Ainsi, même si elles ne réalisent pas elles-mêmes les opérations de tenue de la maison, de suivi scolaire, d’accompagnement des proches etc. elles se sentent comptables de leur bonne exécution. 2/3 des femmes sont en quelque sorte les « managers » de la maisonnée contre 1/3 qui partagent équitablement cette responsabilité avec leur conjoint·e. Ce dernier chiffre monte cependant à 47% chez les femmes qui encadrent au moins 5 personnes dans leur sphère professionnelle. Autrement dit, plus elles managent au boulot, plus on partage dans les familles.
La charge mentale professionnelle
Oui, mais voilà, il existe aussi une charge mentale professionnelle que 71% des femmes ressentent comme excessive. Cette charge mentale professionnelle, c’est d’abord tout ce qui a trait au soin apporté au bien-être collectif au travers d’une foultitude d’attentions qui vont de l’intégration des nouveaux arrivants à l’organisation des pots de départ en passant par le réconfort des collègues, la transmission des codes informels, la convivialité de l’espace de travail, la régulation des tensions… Seuls 3% des hommes s’en chargent seuls, contre 53% des femmes.
Ce « glue work » est indispensable à la performance des entreprises : il tient le collectif, facilite la communication, contribue à la rétention des talents, favorise la productivité. Mais il est largement invisibilisé et évidemment sous-valorisé. A se demander si s’adonner à ce « glue work » n’est pas même facteur de disqualification, comme le soutiennent les chercheuses Linda Babcock, Maria P. Recalde & Lise Vesterlund qui estiment que la transposition d’un rôle domestique réputé féminin dans la sphère professionnelle plombe la carrière des femmes.
Des impacts non négligeables sur la carrière… Et la santé des femmes
Sans aucun doute, la charge mentale a des effets sur la vie professionnelle des femmes : 52% estiment que cela dégrade leur quotidien de travail (déconcentration, difficultés de gestion du temps, perte de productivité…) et 22% que cela restreint indirectement leurs horizons de progression (renonciation à des évolutions, perception de moindre disponibilité par le management, ambiguïtés vis-à-vis de l’ambition en raison de l’accroissement des responsabilités que représenterait la prise d’un poste plus élevé…).
La charge mentale des femmes se ressent aussi dans leurs relations à leur entourage : 18% évoquent des tensions de couple et 10% considèrent que leur disponibilité pour leurs enfants en est fortement altérée. Alors, c’est le grand toboggan de la culpabilité : penser en permanence aux autres, notamment ceux que l’on aime, ne devrait pas aboutir au fait de moins bien les supporter… Sauf quand c’est trop !
Et quand c’est trop, c’est la santé des femmes qui en pâtit. 87% des sondées estiment en effet que la charge mentale, qu’elle soit personnelle ou professionnelle a des impacts sur leur santé physique et/ou mentale. Elles évoquent en premier lieu la fatigue chronique voire des symptômes d’épuisement, puis des troubles du sommeil, des difficultés à déconnecter et à se détendre, de l’anxiété, des maux de ventre ou de tête et pour 14% d’entre elles des symptômes de dépression.
Comment alléger la charge mentale des femmes ?
Interrogées sur les pistes de réduction de leur charge mentale, les femmes du panel de l’Ifop expriment certes la nécessité d’agir elles-mêmes sur leur bien-être (savoir s’accorder du temps pour soi est important pour 81%, réduire le niveau d’exigences sur les tâches domestiques est une promesse que se font 70%) mais en appellent aussi à des recours organisationnels et sociétaux.
Parmi ces recours organisationnels, certains adressent la vie de famille, gravitant principalement autour d’un partage plus équitable des responsabilités domestiques et d’une meilleure communication au sein des foyers pour rendre visible la charge mentale.
D’autres tournent davantage la focale vers les employeurs. Il s’agit d’abord de retrouver une certaine perméabilité entre les espaces-temps de vie professionnelle et personnelle (67% des sondées). Mais il est aussi question d’ouvrir le dialogue managérial et collaboratif sur la planification du travail, sa répartition et sa valorisation.
Marie Donzel, pour le webmagazine EVE