C’est la question à laquelle a souhaité répondre le Boston Consulting Group (BCG) à travers une étude d’envergure internationale publiée le 17 janvier 2019, partant du constat que les entreprises ont désormais compris que pour fidéliser leurs talents et soutenir leur performance économique elles devaient relever le pari de la diversité, mais peinent à toucher leurs cibles et à rendre ces mesures réellement efficaces.
De fait, alors que presque toutes les organisations interrogées (98%) ont mis en place des plans d’actions en matière de diversité et d’inclusion, seulement un quart des salarié·e·s ciblé·e·s par ces politiques déclarent en avoir personnellement bénéficié. Mais d’où vient ce hiatus entre action (intention) et perceptions des actions (impact) ?
Des strates dirigeantes qui dénient la prégnance des biais
Quand on leur demande s’il existe des obstacles à la diversité et à l’inclusion dans leur entreprise, plus d’un tiers des employé·e·s issu·e·s de la diversité répondent par l’affirmative. Et plus de la moitié déclarent que les biais font partie intégrante de leur expérience professionnelle quotidienne… À la différence des hommes hétérosexuels blancs qui, dans les faits, sont encore largement majoritaires aux positions de responsabilités et sont significativement plus susceptibles de déclarer que leur quotidien professionnel est dépourvu de biais.
… Et qui placent leur attention au mauvais endroit !
Pour le cabinet BCG, les défis de la diversité et de l’inclusion se jouent à quatre niveaux : le recrutement, la rétention des talents, la progression de carrière et l’engagement de la direction. Or, les dirigeant·e·s auraient tendance à se concentrer sur la phase de recrutement, en accordant trop peu d’importance aux problématiques d’inclusion, c’est-à-dire à la capacité de l’organisation à donner à chacun·e la possibilité de faire valoir son être-soi et de contribuer pleinement au collectif. Pour les personnes issues de la diversité, les obstacles se situent bien tout au long du cycle de vie de leur activité professionnelle.
Ce que veulent les salarié·e·s issu·e·s de la diversité
Le cabinet BCG a donc interrogé près de 16 500 personnes issues de 14 pays pour identifier les meilleures mesures de diversité et d’inclusion en leur demandant d’évaluer l’efficacité de 31 initiatives. L’idée était de recueillir les avis de trois populations issues de la diversité en vue des analyses croisées : les femmes, les personnes racisées et les personnes LGBTQI+.
Une typologie de trois catégories de mesures sont ressorties de cette étude :
- Les mesures « retour à l’essentiel », qui mettent tout le monde d’accord indépendamment de l’âge, du sexe, de la couleur de peau ou de l’orientation sexuelle. On y retrouve par exemple la mise en place de politiques antidiscriminatoires ou encore la mise à disposition de formations pour atténuer les biais et améliorer les compétences culturelles.
- Les mesures « prouvées » sont celles identifiées par les groupes de diversité comme étant spécifiquement efficaces en ce qui les concernent. Par exemple, les femmes valorisent les programmes de flexiwork, les personnes racisées favorisent les process de recrutement à l’aveugle et le recours à des panels de candidat·e·s diversifié·e·s et les personnes LGBTQI+ mettent en avant les actions qui envoient des signaux forts sur le positionnement « LGBT friendly » de l’organisation.
- Les « joyaux cachés » sont les mesures que les groupes de diversité trouvent efficaces alors qu’elles sont sous-estimées par les populations dirigeantes. Ces dernières devraient donc capitaliser sur ces pépites inexploitées, qui varient en fonction des différents critères d’appartenance. Les femmes s’attachent ainsi particulièrement aux indicateurs qui montrent que leur évolution de carrière est possible. Il s’agit donc de donner de la visibilité à des roles modèles féminins à même de les inspirer et de proposer des outils qui leur permettront de répondre au défi de l’équilibre vie pro/vie perso : des congés parentaux, une couverture santé adaptée, une offre de modalités de garde d’enfants… Les salarié·e·s racisé·e·s sont à la recherche de recrutements et de promotions plus justes, avec des sponsors et des accompagnements individuels (qui peuvent prendre la forme d’une offre de mentoring). Les salarié·e·s LGBTQI+ attendent surtout les preuves d’un environnement professionnel moins biaisé, par exemple à travers la mise en place d’une culture d’entreprise avec une tolérance 0 sur les blagues homophobes ou des aménagements structurels, comme le fait de disposer de toilettes non genrées ou d’inclure une possibilité de réponse non binaire en matière de genre dans les enquêtes qui leur sont proposées.
Valentine Poisson pour le webmagazine EVE