Le blog EVE suit quotidiennement l’actualité des initiatives et des débats sur l’égalité professionnelle, la mixité et le leadership équilibré.
Ce mois de mars a bien sûr été marqué par les manifestations du 8 mars, mais dans la mesure où la Journée Internationale Des Droits de Femmes a été largement couverte par les médias, nous prenons le parti d’attirer votre attention sur 5 autres actus plus inattendues.
La pub du mois : des championnes contre les préjugés et stéréotypes
Escrime, patinage, boxe et parkour comptent parmi les sports présentés dans la nouvelle campagne de publicité de Nike qui met en lumière des athlètes féminines arabes. Dans ce spot à destination des publics du Moyen-Orient et du Maghreb, on voit des athlètes d’excellence s’adonnant à fond à leur sport sous les regards a minima surpris, quand ce n’est pas carrément sévères des passants. En contrepoint, on entend la petite voix intérieure de ces femmes qui les encourage à persévérer.
Ce message d’audace et de panache dit combien c’est parfois en forçant les obstacles que l’on peut « imposer sa chance, serrer son bonheur et aller vers son risque » : « à les regarder, ils s’habitueront », dirait le poète René Char.
L’expérience d’inversion du mois : et si on échangeait nos signatures ?
Nicole et Martin exercent le même métier dans une maison d’édition. Un jour, Martin est bien surpris par le ton grossier employé en réponse à l’un de ses mails par un client, complètement décalé par rapport aux échanges habituels. Relecture du mail initialement envoyé, Martin découvre qu’un incident technique a eu lieu et que c’est la signature de sa collègue, Nicole, qui figure à la place de la sienne. Martin renvoie un mail en expliquant la situation et annonce qu’il reprend la main sur le dossier. Changement radical de ton, les propositions refusées à Martin quand il signait Nicole sont alors acceptées.
Pour s’assurer que cette réaction est réellement corrélée à l’échange de signatures, Nicole et Martin renouvellent l’expérience et échangent leur identité délibérément pour quelques semaines. Le verdict est sans appel : c’est l’enfer pour Martin qui déclare : « Tout ce que je suggérais était remis en question », le ton employé était condescendant, et qu’elle ne fût pas sa surprise lorsqu’un client lui demanda s’il était célibataire… Du côté de Nicole, tout va bien ! Elle raconte n’avoir jamais été aussi productive, tout était plus fluide, plus besoin de négocier autant qu’elle le faisait sous sa réelle identité.
Fortement médiatisée, cette expérience « vis ma vie » révèle la persistance de préjugés sexistes qui brouillent les relations de travail et nuisent à la performance globale.
L’initiative digitale du mois: une Tech Women en Israël
Plusieurs rendez-vous autour de la mixité dans la tech ont eu lieu en ce mois de mars 2017, comme à Paris où s’est tenue la Journée de la Femme Digitale sur la thématique #ForABetterWorld et l’enjeu du digital pour la création d’un futur plus égalitaire entre femmes et hommes. C’est cette même problématique qui a été traitée en Israël, à l’occasion du « Tech Women ».
Ce rendez-vous, avec au programme rencontres, conférences et visites de laboratoires, est l’une des initiatives proposées par le Technion, institut de recherche et université publique d’Haïfa qui entend bien oeuvrer à forger des vocations scientifiques chez les femmes.
A son ouverture en 1924, l’université n’accueillait qu’une seule et unique femme ; en 2017, elles représentent 37%. L’objectif est bien d’atteindre une parfaite parité dans tous les secteurs en misant sur l’inclusion des femmes dans la révolution numérique. Ce sont donc plus de 700 lycéennes qui ont été accueillies par les anciennes étudiantes, qui ont joué les rôles modèles inspirantes, en leur tendant la main pour les embarquer dès la rentrée prochaine dans le vaisseau de la tech.
Les écolières du mois : quand les grand-mères font leur rentrée
L’illettrisme reste un fléau en Inde, avec 26,5% de la population privée des moyens de lire et écrire couramment, dont deux fois plus de femmes que d’hommes. Ce phénomène est lié au statut inférieur accordé historiquement aux femmes sur le sous-continent asiatique et à leur mariage précoce, dès la puberté dans certaines régions rurales.
Le professeur Yogendra Bangar, fondateur de l’Académie AADHYAS dédiée à l’éducation des populations défavorisées, a décidé de prendre le problème à bras le corps en ouvrant une classe accueillant 29 femmes âgées entre 60 et 80 ans. Elles prennent ainsi chaque matin le chemin de l’école, cartable en main pour apprendre à lire, à écrire et à compter.
Autrefois dans l’incapacité de réaliser seule certaines tâches courantes, l’une d’elle exprime, à 75 ans, sa fierté d’être autonome : « A la banque, j’avais l’habitude de donner mon empreinte digitale (en guise de signature). Ça me faisait me sentir honteuse. Maintenant, je suis fière de signer de mon nom. »
En favorisant l’empowerment de ces grands-mères, cette initiative a permis de changer l’opinion des habitants du village sur le statut des femmes et à faire prendre conscience de l’importance d’une scolarisation pour toutes et tous.
Le buzz du mois : quand la marmaille perturbe l’analyse de l’expert
Le 10 mars dernier, Robert E. Kelly, professeur de sciences politiques en Corée du Sud est interviewé en direct par la BBC depuis son domicile, quand tout à coup, ses enfants tout enjoués font irruption dans son bureau. Le journaliste indique alors à l’expert la présence de sa progéniture à l’écran mais imperturbable, il continue son analyse. Surgit alors une femme paniquée qui embarque au plus vite les enfants en dehors du bureau.
La vidéo fait le buzz (visionnée plus de 85 millions fois), suscitant majoritairement le rire d’une part et les commentaires enthousiastes sur cette nouvelle paternité télétravailleuse d’autre part… Mais d’autres analyses plus critiques s’entendent aussi : quelle est la place de la conjointe, présentée comme une domestique par les médias dans un premier temps ? La visibilité médiatique d’un.e expert.e justifie-t-elle qu’il/elle n’accorde pas un regard à ses enfants quand ils le/la dérangent dans son travail ? Et si l’expert avait été une femme, quelle aurait été sa réaction ?
Une parodie de l’incident est diffusée quelques jours plus tard sur la toile, mettant en scène une superwoman en duplex. Jugez par vous-même !
Epilogue de l’affaire : Kelly et sa famille ont tourné une vidéo explicative mettant fin à toutes les supputations sur le statut et la condition de la femme apparue à l’écran (non, ce n’était pas la nanny !), le traitement réservé aux enfants et le bon esprit général qui règne dans ce couple à double carrière.
Elina Vandenbroucke et Marie Donzel, pour le webmagazine EVE.