L’étude du mois
L’association Jump, en partenariat avec le cabinet de conseil Axiom, consacre sa grande étude annuelle à la vision de l’égalité chez les hommes européens.
Sont-ils désormais parfaitement convaincus que c’est leur affaire autant que celle des femmes?
Quels efforts sont-ils prêts à consentir pour mieux partager les responsabilités?
Y a-t-il des différences manifestes entre les générations d’hommes? Entre les positions socio-professionnelles des uns et des autres?
Le blog EVE a lu cette cette enquête en détail et vous en livre les points clés à retenir.
Les hommes ont conscience qu’ils bénéficient aussi de l’égalité
Ils sont en moyenne 78% à estimer qu’ils tirent profit de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Cependant, les chiffrent varient selon les situations socio-professionnelles : plus leur position dans la hiérarchie et leur statut social sont élevés, plus les hommes sont convaincus des bienfaits de la mixité.
A moins, suggèrent les auteur.es de l’étude que les « exec » et les seniors se sentent tout simplement moins « menacés » par la montée en puissance des femmes qui, plafond de verre aidant, s’arrête souvent aux portes des plus hautes responsabilités.
Plus convaincus en début et en fin de carrière des vertus de l’égalité
C’est entre 20 et 29 ans, puis après 60 ans, qu’un homme se sent le plus en phase avec l’objectif d’égalité.
Mais quand ils sont en coeur de carrière, les sentiments sont plus ambigus : au moment de la vie professionnelle ou progression rime volontiers avec compétition, l’idéal d’égalité a un peu moins de vertus à leurs yeux.
Peu d’opposants assumés, mais beaucoup de « résistants passifs »
On ne trouve que 4% d’hommes qui affirment ne pas vouloir plus d’égalité… Mais 56% d’hommes qualifiés de « résistants passifs » ont la lucidité de savoir que ne rien faire pour, c’est tout comme faire contre.
28% sont des « supporters passifs » qui se disent favorables à plus de mixité mais ne prennent pas spécifiquement d’engagements pour la faire progresser.
Au final, seuls 12 % d’hommes sont prêts à se mouiller pour faire avancer la cause.
Les papas de filles sont plus sensibilisés
Etre papa ou pas ne change pas grand chose à la perception qu’ont les hommes de l’égalité…
Sauf quand ils ont des filles à la maison : ils se montrent alors 6 points d’indice plus sensibilisés que ceux qui n’élèvent que des garçons.
Les doubles carrières et l’autonomie financière des femmes favorisent l’engagement
Quand ils ont une compagne qui gagne autant ou davantage qu’eux, les hommes sont plus volontiers persuadés des bénéfices de l’égalité. Voilà qui tord le cou au cliché selon lequel les hommes vivraient mal le fait de ne plus être les seuls breadwinners du foyer.
D’autant que les chiffres de la considération de l’égalité chutent de 14 points quand les hommes ont une partenaire qui ne perçoit pas de revenus ou pas de partenaire du tout.
L’argent ne fait pas tout, et heureusement, dans une relation de couple, mais il est manifeste que l’autonomie financière des femmes participe à installer un climat conjugal plus équilibré.
Les hommes ne sont pas fans des quotas…
… Comme beaucoup de femmes d’ailleurs, qui s’inquiètent souvent d’une possible confusion entre ce qu’elles doivent à leurs compétences et ce qu’elles obtiendraient pour remplir des objectifs chiffrés !
Même entendu comme un moyen d’accélérer la mixité, les quotas inspirent méfiance à 1 homme sur 3. Ils sont plus favorables à une plus grande flexibilité de l’organisation du travail pour faciliter la conciliation des temps de vie et prône de façon générale des mesures de long terme…
Ou à la rigueur à des promotions immédiates de femmes, mais plutôt quand c’est à d’autres hommes qu’on demande de « passer leur tour » !
Les stéréotypes (f)ont la vie dure
Aux hommes du panel, les enquêteurs et enquêtrices ont soumis la question suivante : « A compétence et expérience équivalentes, un homme a 5 fois de plus de chance qu’une femme d’accéder à un poste de leadership. D’après vous, pourquoi?« .
45% n’ont pas d’explication, 20% pensent que les femmes manquent d’ambition, 13% que leur tempérament (supposé) plus coopératif que directif fait obstacle à leur nomination et 10% qu’elles manquent de soutiens pour faire valoir leur candidature.
Les stéréotypes n’ont pas fini de cimenter le plafond de verre. Et ils sortent encore renforcés de la perpétuation de l’idée d’une « complémentarité » entre femmes et hommes qui seraient la raison même du partage sinon des responsabilités, des rôles que chacun.e peut tenir : essentialisme, quand tu nous tiens!
Ce que démontre l’étude Jump dans sa globalité, c’est une relative « sérénité » des hommes quand on leur parle d’égalité…
Mais cette tranquillité d’esprit est-elle la marque d’une acceptation qui ne demande qu’à trouver un cadre et des leviers pour un engagement plus actif ; ou bien le signe d’un mouvement pour l’égalité qui, au fond, ne « dérange » pas beaucoup les positions établies et les habitudes installées?
Que l’on voit le verre à moitié plein ou à moitié vide, une question de fond est ici soulevée : comment faire bouger les hommes, les femmes et les organisations dans une même dynamique de mixité qui, en plus de répondre à un principe de justice, a apporté des preuves de sa contribution à la performance?
Marie Donzel, pour le blog EVE. Avec la complicité de Jean-Michel Monnot (Cabinet All Inclusive!)